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“Amazigh, afrique, enjeux identitaires” à Tanger

كتبه كتب في 21 أغسطس 2014 - 11:20

L’association Twiza a inscrit cette année sa 10ème édition du festival Twiza sous le slogan « l’Afrique aux africains », du 14 au 17 Août 2014, ce qui a permis aux intervenants et au public venu nombreux de  s’interroger et de se laisser questionner, sur le passé, le présent, et le devenir en tant qu’africains et amazighs. Le Festival Twiza a inauguré cette édition par  une conférence sous le thème « Amazighité, Afrique, enjeux identitaires ». On attribue au grand roi Amazigh de la Numidie, Massinissa, la formule restée célèbre : “l’Afrique appartient aux Africains”. Le nom « Afrique » proviendrait du mot amazigh Taferka  qui signifie terre, qui a donné « africanus  » en latin. Selon d’autres chercheurs, le mot Afrique provient de la tribu amazighe des Ayt Ifren, dont l’ancêtre est appelée aussi Afer. Ce sont les Romains qui ont utilisé « Africa » pour nommer, au départ, la Numidie, région amazighe du nord de Tamazgha. Selon Michèle Fruyt, le terme Africa est apparu dans les langues européennes par l’intermédiaire des Romains qui désignait la partie nord du continent car, africus qualifiait le vent pluvieux provenant de la région de Carthage. Ce nom sera étendu, au Moyen Âge, à la totalité de la région située au sud de la Méditerranée. Longtemps, le terme Afrique n’a servi qu’à désigner l’Afrique du Nord à dominante amazigh (sauf l’Egypte), le sud était appelé Éthiopie.  Puis le mot évoluera par la suite, puisqu’il finira par devenir le nom de tout un continent, le continent africain, l’Afrique. Le mot Afrique, plus tard, sous l’influence arabo-islamique, nous échappera, nous africain du nord. Nous désignerons souvent par africains, les populations subsahariennes et  nous nous désignerons nous même par le mot Maghreb arabe ou grand Maghreb, les européens en fera de même d’ailleurs. Le plus choquant, c’est l’identité énoncée dans la dernière constitution marocaine  où il est stipulé que : « l’unité du Maroc est forgée par la convergence de ses composantes arabo-islamique, amazigh et saharo-hassani, et nourrie et enrichie de ses affluents africain, andalou, hébraïque et méditerranéen ». Avons-nous changé de continent ou y a-t-il eu une dérive des continents entre temps pour qu’on nous parle d’affluents africains arrivés chez nous??? Mais les choses sont claires quand on trouve plus loin cette phrase qui exprime le souhait d’approfondir notre appartenance à la Oumma arabe et islamique !!! Et le souhait de consolider nos relations avec les pays d’Afrique ! Nous constaterons aussi que l’identité amazighe du pays est citée après la composante arabo-islamique, bien qu’elle soit le socle même de ce pays.                              Notre Afrique, continent couvrant 7 % de la surface terrestre. Avec plus de 1,1 milliard d’habitants représente 16 % de la population mondiale. Depuis l’accession à l’indépendance du Soudan du Sud en 2011, l’Afrique compte 54 États souverains. L’Afrique, berceau de l’humanité est le continent le plus ravagé par les conflits. Selon l’Atlas stratégique2008, sur 41 conflits graves répertoriés dans le monde, 16 sont situés en Afrique. Ces conflits en Afrique sont des: conflits dits « ethniques » dont les causes de certains sont attribuées au tracé colonial des frontières, conflits dits « politiques » du au fait que les intérêts des dirigeants passent avant ceux des populations, conflits dits « sociopolitiques » dus à cette extrême pauvreté; et des guerres civiles aux enjeux internationaux.

Quant est-il du terme Amazigh ? Le mot AMAZIGH, longtemps banni du langage et réprimé par les pouvoirs en place a eu du mal à faire sa place durant les derniers siècles. Appelés communément Berbères, les amazighs, ne se sont jamais désignés eux-mêmes par ce nom. Ce sont les anciens Grecs, qui ont créé dans leur langue le mot « barbaros », pour désigner tous les autres peuples, y compris les Romains, où ils ne voyaient que des êtres grossiers et primitifs. Mais, jusqu’au début du XIXème siècle les Européens en général utilisaient pour parler de l’Afrique du Nord ce même terme. En français, la forme « Berbère » avait déjà commencé à se substituer à la forme Barbare vers la fin du XVIIème siècle. C’est de là aussi que semble venir la forme Berbero commune à l’espagnol et à l’italien. Mais pourquoi ce vocable a-t-il subsisté aussi longtemps ? C’est qu’au VIIème siècle, les envahisseurs arabes de ce qu’on nomme actuellement le grand Maghreb ont emprunté le terme Barbarus aux Byzantins qui nous considéraient, comme étant leurs ennemis. Aucun Amazigh pourtant n’a jamais utilisé ce terme pour se désigner, ils se sont désignés depuis le début comme étant Amazighe, c’est-à-dire, étymologiquement, un homme et femme libre et noble à la fois. Peuplant un territoire immense, allant de la vallée du Nil jusqu’à l’océan Atlantique et l’ensemble du Sahara où ils fondèrent de puissants royaumes, formés de tribus confédérées, les Imazighen, pluriel du mot amazigh ont pour  langue « Tamazight ».                            Aujourd’hui, on ne peut que reconnaître la douloureuse réalité du fractionnement géographique du monde amazighe. La principale cause de ce fractionnement est d’ordre historique : l’islam a entraîné l’arabisation de pans entiers de la société berbère, et amené des générations successives d’Amazighes à se dire, et souvent à se vouloir arabes. Ce fractionnement est dû ensuite au fait que le colonialisme français a tracé la plupart des frontières des Etats africains riverains du Sahara, sans le moindre égard pour les différences ethniques. De cela, il a résulté que les amazighs, sont de plusieurs nationalités. Ils sont principalement marocains et algériens, mais aussi libyens, tunisiens, mauritaniens, maliens, nigériens, bourkinabés, ou même tchadiens. Aujourd’hui, il existe une importante diaspora amazighe bien implantée, en Espagne, en France, aux Pays-Bas, en Allemagne, et en Belgique, et de plus en plus au Canada et aux Etats-Unis. Discrimination, racisme, marginalisation appauvrissement, spoliation de leur terre et déperdition de leur langue et culture amazighes, d’un pays à l’autre les conséquences sont les mêmes, mêmes si les différences de contexte sont quelquefois différentes.

Après un vibrant hommage rendu à la militante amazighe Meryam Demnati et au militant Mohamed Chami pour tout le travail accompli durant des décennies pour la cause amazighe, la table ronde présidées par nos deux professeurs autour du thème “Amazigh, Afrique : Enjeux identitaires”, a permis de faire l’état des lieux de certaines régions de Tamazgha.    Le Mzab dans le sud algérien, l’Azawad, la Tunisie, les Pays bas, et bien sûr le Maroc.         La rencontre a donc eu le plaisir de recevoir, Kamelddine Fekhar, médecin et activiste dans le domaine des droits humains venu tout droit du Mzab, territoire amazighophone, située dans la wilaya de Ghardaïa, à 550 km au sud d’Alger où des évènements tragiques ont eu lieux ces derniers mois. Depuis plusieurs mois, des bandes de pillards organisées continuent de terroriser la population : assassinats, agressions, pillages, incendies; tout cela avec la complicité des forces de l’ordre qui n’hésitent pas leur donner un coup de main contre la population mozabite (plusieurs vidéos confirment cela). Après l’assassinat de la dernière victime Mass Hamidoudjana Hocine en Juillet jeudi 2014, aucune arrestation n’a été faite, bien au contraire, les forces de la gendarmerie ont encerclé, réprimé, terrorisé et asphyxié la population avec des bombes lacrymogènes, incendiant et saccageant au passage des maisons et des voitures et effectuant des arrestations arbitraires dans le but d’intimider. Depuis le début des évènements, la complicité étroite des forces de l’ordre avec les hordes de pilleurs et d’agresseurs, n’a jamais fait de doute.  Le deuxième intervenant, Moussa ag Taher, est le porte parole officiel du MNLA, mouvement national de libération de l’Azawad, dont la population continue à vivre une situation intolérable depuis l’époque des indépendances. Le MNLA prend à témoin les instances internationales de la situation de guerre  imposée par l’armée malienne, et ce, en dépit de ses engagements internationaux et des accords préliminaires de Ouagadougou. Il tient à signaler qu’il fait l’objet d’une vaste campagne de désinformation et de dénigrement visant à assimiler son combat légitime à des groupes de terroristes. Il tient également à réaffirmer à l’opinion internationale qu’il a toujours œuvré dans le sens de la confirmation du droit des êtres humains à disposer librement d’eux-mêmes, à vivre dans la dignité et à jouir de tous leurs droits naturels, et ce, conformément au droit à l’autodétermination consacré par les Nations Unies.

–           Quant à la troisième intervenante, Stéphanie Poussel, chercheure associée à l’Institut de recherche sur le Maghreb contemporain à Tunis, elle a fait part de son travail fait notamment sur la politisation des identités culturelles au Maghreb et sur les enjeux politiques des langues au Maroc et en Tunisie. Abderrahman El Aissati, quatrième intervenant, originaire du Rif, chercheur à l’Université de Tilburg du Department of Culture Studies dans les Pays bas, a fait part de son expérience dans le mouvement amazighe hollandais et dans la chaine de télévision Amazigh TV (locale dans les grandes villes des Pays-Bas) et sur internet qu’il a fondé en 2006. Pour conclure,  Mass Mohamed Boudhan, activiste amazigh, directeur du regretté mensuel amazigh « Tawiza », connu par sa déconstruction de nombreuses fausses idées en vogue au Maroc sur la langue; la culture; l’histoire; l’arabisation;  l’arabité, l’amazighité, nous a fait part quant à lui de l’idée de l’identité débarrassée de sa connotation raciale erronée pour en faire une notion à contenu territorial et géographique qui renvoie, non pas à la race et la descendance généalogie, mais au territoire où vit la communauté humaine concernée, d’où elle tire sa véritable identité, quelque soient les origine raciales des membres de cette communauté.

Par Idder Idji

 

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